La porte des étoiles était activée, déversant une flopée de vagues bleues à sa surface. Le Général O’Neill venait de donner l’ordre d’ouvrir l’iris car après un subtil échange radio, il avait été confirmé que l’invité qui allait mettre les pieds ici commençait à être connu des terriens.
C’est ainsi qu’un Jaffa rebelle arriva sur Terre, sa masse corporelle apparaissant devant la porte et restant immobile sur la rampe, tâtant de la semelle comme pour s’assurer que le sol grillagé était bien stable.
« Bienvenue sur Terre, Abaddon. Ce n’est pas la première fois que vous venez ici, pas vrai ? »
En effet, c’était la seconde. La première fois remontant au moment où ils s’étaient tous rassemblés en salle d’embarquement avant d’attaquer la base d’Anubis sur Nebek.
« Je me souviens de cet endroit. » Répondit-il avec son air habituellement méfiant et serein, dégageant une certaine aura dangereuse qui pouvait faire frissonner n’importe quel homme qui ne le connaissait pas un minimum.
O’Neill l’invita jusqu’à son bureau, où leur conversation serait plus confidentiel entre quatre murs qu’il connaissait bien. Sur le trajet, Abaddon n’avait rien dit, se contentant d’observer autour de lui. Il n’était pas armé, ce qui était assez rare pour le signaler. Une fois qu’ils arrivèrent dans la petite pièce, porte fermée, Jack s’assit sur son fauteuil de cuir et en hôte chaleureux qu’il était, il invita le Jaffa à s’asseoir. Invitation que ce dernier déclina respectueusement de la main.
« Alors… Dites-moi Abaddon. » Le fait de voir le jaffa debout devant lui le mettait légèrement mal à l’aise pour parler. Pourtant il en voyait défiler des gars au garde à vous devant son bureau…
Sauf que là il ne s’agissait pas de n’importe quel individu. Abaddon était quelqu’un d’assez musclé. Ses épaules et ses pectoraux occupaient une grande place dans sa corpulence, contrairement à sa tête, petite et presque disproportionné. Il avait les cheveux courts, une barbe de trois jours, des yeux sombre et des mains plus habiles qu’elles ne le laissaient paraître.
« Qu’est-ce qui vous amène sur notre jolie planète ? »
Le jaffa haussa un sourcil, légèrement surpris. Cette planète n’était guère attirante. A chaque fois qu’il venait ici, il passait son temps entre des murs grisâtres. Un décor bien triste et différent des forêts et montagnes qu’on pouvait voir sur sa planète d’origine, qui elle était effectivement dès plus jolie à observer.
« Je suis venu parler de Svarog. » Dit-il très clairement, nourrissant l’interrogation dans le regard du Général.
« Il est bien mort ? »
« Heureusement oui, et cette fois-ci aucun sarcophage ne pourra rien faire pour lui… Son âme, son nom et sa renommée font parti du passé maintenant et la plupart de ses territoires ont subi les conséquences de sa soudaine disparition. »
« La plupart ? » Nota Jack, qui avait peur de savoir dans quoi allait l’emmener le rebelle. Ce n’était sûrement pas une simple visite de courtoisie pour donner quelques nouvelles et parler de la galaxie en générale, autour d’une bière fraiche.
« A sa mort, ses jaffas ont rejoint les rangs d’Anubis et celui-ci a décrété que les Fils de Svarog devaient connaître le même destin que leur soit disant père… La mort. »
« Vous voulez parler des fanatiques humains engagés par Svarog pour grossir ses armées ? »
Abaddon hocha doucement de la tête. Il avait lui-même été jaffa de Svarog autrefois et connaissait très bien les petites manies de son ancien maître. Les mains croisées dans le dos, il continua son récit.
« Sans faux Dieu ni chef pour guider la population de sa planète mère, une guerre civile a alors éclaté. Il y a eu de nombreux morts, et ceux qui ont survécu ont abandonné les lieux. La Citée Céleste n’est plus que l’ombre de ce qu’elle a été. Elle a perdu son éclat et sa beauté qui la rendait si célèbre. Il ne reste plus que les vestiges encore fumant d’un empire qui s’est tellement rapproché de la perfection qu’il s’en est brûlé les ailes. »
« Attendez… » Le coupa Jack, bien qu’il appréciait cette dernière touche de poésie dans les paroles d’Abaddon. « Anubis n’a pas annexé les territoires de Svarog ? »
« Pas sa planète mère. » Répliqua le jaffa. « Elle ne représente aucun intérêt aux yeux d’Anubis… Pas de Naquadah, entre autre. Et elle se situe dans une zone éloignée des systèmes goa’ulds pour que sa position puisse être un quelconque avantage tactique dans ses conquêtes. » Le Général ne réagit pas tout de suite, un peu perplexe, avant d’acquiescer lentement et d’écouter la suite.
« Je suis venu ici pour vous donner cette information au cas où vous seriez intéressé à l’idée d’envoyer une équipe sur cette planète. »
« Dans quel but ? Pour piller ? Je ne pense pas qu’il reste encore beaucoup de technologies intéressantes dans cette citée à l’abandon. » Un sourire naquit légèrement sur ses lèvres quand il se rendit compte qu’il avait failli faire un jeu de mot avec le prénom du jaffa.
« Je n’appellerais pas ça piller… Disons juste que des choses délaissées sont peut être restées là-bas : des armes, mais surtout des informations écrites ou enregistrées que seul Svarog détenait au sein de son palais… Vous devriez y réfléchir Général. L’information est le nerf de la guerre. Et Svarog figurait comme l’un des plus important bras droit d’Anubis. »
« Et aucun autre goa’uld n’a pensé à y jeter un coup d’œil ? Etonnant… »
Abaddon lui sourit, pour la première fois depuis qu’il le connaissait. Cela lui fit un choc de voir ça.
« Ils sont tous occupés par la grande guerre… Cela ne coûte rien d’aller vérifier. »
« Peut être... Mais je ne garanti rien. » Répondit O’Neill au tac-o-tac. « Je vais ordonner à ce qu’on envoie des sondes explorer cette fameuse citée céleste avant de décider quoi que se soit. »
« Evidemment. C’est le protocole, j’imagine. »
« C’est surtout que je n’ai pas envi d’envoyer mes hommes dans la gueule du loup… Vos informations sont bien sûres ? Viennent-elles de Tolok ? »
Abaddon gigota un poil à l’annonce du nom du vieux guide, chef désigné par les jaffas rebelles pour sa sagesse, son expérience et sa vision tactique des choses. Cela faisait un moment qu’il était à la tête de ce mouvement, malgré les hauts et les bas.
« Elles sont sûres… Mais ce n’est pas Tolok qui m’envoie. Il a d’autre chat à fouetter. De plus, ça fait longtemps que je ne l’ai pas vu et franchement, il ne me manque pas. » Abaddon avait toujours désiré être un leader indépendant et n’avait jamais vraiment accroché aux beaux discours de Tolok.
« Ah oui je vois… Pourtant vous savez ce qu’on dit. L’union fait la force. »
« Pas cette fois… Et puis pour des raisons de sécurité il est préférable qu’on ne se rassemble pas tous autour de lui. Plus on est regroupé et plus on risque de disparaître tous en même temps si un goa’uld venait à nous piéger. Nous préférons agir en petits groupes éparpillés dans la galaxie, et frapper comme des équipes embusquées et non pas avec la lenteur et la prévisibilité d’une grosse armée. C’est ce qui fait notre force. »
« Pour le moment. » Répondit Jack, qui commençait à mâchouiller le bouchon d’un stylo Bic.
Il y eut un blanc, chacun étant perdu dans ses pensées. Du moins c’est ce que crut le commandant du SGC quand il se rendit compte que son allié jaffa le fixait, dans l’attente d’une réaction suite à cette conversation. Finalement, il reposa le bout de plastique mâché et se leva de son siège.
« Si j’envoie une équipe jeter un œil sur cette planète… Serez-vous du voyage avec eux ? »
« Mis à part Drey’Ac et quelques frères occupés sur d’autres mondes, je n’ai personne d’autre à qui faire confiance pour ce genre de mission. Mais oui, Général O’Neill, je serais du voyage. »
Sa remarque sur la confiance toucha sincèrement Jack, qui en fut surpris. Il était vrai qu’Abaddon commençait à bien les connaître, lui qui avait combattu à leurs côtés sur Nebek et qui avait participé à la chute de Svarog, une chute catalysée par les Black Eagles Il se souvenait bien avoir lu le rapport du Colonel Narah racontant cet évènement dans un style littéraire douteux, mentionnant les actions du jaffa rebelle qui avait donné un coup de main au français au moment ou il en avait le plus besoin. C’était le genre d’acte qui méritait qu’on lui fasse confiance. Une confiance que les tok’ras ne possédaient plus à ce jour.
Ainsi, le Général O’Neill salua Abaddon et partit en salle de contrôle donner ses instructions…
Sujet: "Je me souviens de cet endroit." (Intro MJ Jack)