Installée dans mon labo, j’étais en pleine études des photos que j’avais réalisé lors de ma dernière mission chez les civilisés. Mission qui s’était mal terminée, à telle point que cette étude me donnait beaucoup de fil à retordre à cause des sueurs froides que me provoquaient la vision de ces lieux. La violence, les morts, la torture… Tous ces souvenirs que j’aurais préféré occulté mais que je ne pouvais pas. Je devais faire mon travail.

J’étais en pleine recherche sur les potentielles origines de leurs architectures lorsqu’un appel par ma radio me fit sursauter.

Radio : « Docteur Hash, vous êtes demandé en salle d’interrogatoire ! »

Un rien angoissée et me demandant ce qu’on pouvait bien me vouloir, je répondais que j’arrivais immédiatement. Dans cet endroit, lorsqu’on vous demandait de venir, il ne valait mieux ne pas trainer dans les couloirs au risque d’avoir des ennuis.
Etait-ce en rapport avec la mission ? Avec mon expédition nocturne non autorisé ? Avec… Lui ? Non, impossible ! Il avait bien tenté de me contacter ce matin mais je n’avais pas répondu. Dans son message, il disait m’avoir retrouvé et qu’il voulait me voir. Qu’il ne me laisserait jamais partir. Que j’étais à lui.
Non, il ne pouvait pas m’avoir retrouvé. J’avais pris des précautions… Pourtant, un doute subsistait. Ce qu’on faisait ici avait beau être secret défense, les gens pouvaient toujours connaître le lieu.

Les mains tremblantes et moites, je tentais de me composer un masque des plus assurés. Après tout, je n’avais peut-être rien fait de mal. Peut-être voulaient-ils simplement des éclaircissements sur mon compte rendu. Oui, c’était certainement de cela qu’il s’agissait.

Je respirais un bon coup avant de passer la porte menant au couloir des salles d’interrogatoires. Deux militaires m’attendaient pour me conduire dans une salle où un officier me tendit la main pour me saluer. Une vitre nous séparait d’une autre pièce et mon cœur rata un battement en apercevant qui était assis de l’autre côté. Instinctivement, je reculais dans un coin afin de ne plus le voir.
L’officier qui m’avait accueilli ne sembla cependant pas s’en rendre compte.

« Ha, Docteur Hash ! Ravi de voir ! Comment allez-vous ? Me demanda-t-il sur le ton de la conversation et sans même attendre que je lui réponde, ce que de toute façon, j’aurais été incapable de faire, il continua. Nous avons arrêté cet individu alors qu’il tentait de pénétré dans la base ! Il a donné votre nom, prétendant que vous êtes sa femme ! Il dit s’appeler Michael Jensen ! »

Le souffle me manquait. Le SGC savait que j’avais été marié mais je n’avais jamais donné de raison à mon départ du foyer conjugal. Je n’avais jamais donné d’information trop personnel et avais expliqué mes passages à l’hôpital par de la malchance, de la maladresse.
Mais là, j’étais coincée. Je ne savais plus quoi faire, une chose était sûr, je ne me sentais pas capable de l’affronter. Oui j’avais combattu des aliens, affrontée la mort et la torture mais là, la situation était bien différente. Face à lui, je n’étais qu’une faible femme incapable de se défendre. Je craignais de céder une fois de plus si je lui parlais.

Non, je devais garder confiance en moi, je ne m'appelais plus Jane Jensen mais Elizabeth Hash. J'avais changé de vie, changé de continent, changé du tout au tout.
Et pourtant il était bien là. Il m'avait retrouvé une fois de plus...

Je restais donc prostré contre le mur, incapable de dire un mot alors que l’officier me faisait face, ne comprenant visiblement pas ma réaction.

Incapable de réagir, je laissais les minutes passer comme si le temps passant, la situation allait disparaître.
Comment avait-il réussi à me retrouver ? Comment était-il arrivé jusqu’ici ? Pourquoi ne pouvait-il simplement pas me laisser en paix ?

J’étais si fatiguée de cette lutte incessante contre ce passé que je commençais à me dire que j’allais devoir faire avec et accepter cette situation. Après tout, peut-être était-ce mon destin. Peut-être était-ce de ma faute tout ce qui se produisait. Peut-être devais-je simplement l’accepter plutôt que de fuir.

"Lieutenant. Docteur Hash. Vous lui avez mis les menottes. Est-ce vraiment nécessaire ?"

En entendant la voix de Jack O’Neill, la seule réaction que je pus avoir fut de lever le regard vers lui. Je n’avais pas vraiment entendu ce qu’il avait dit mais il était là et sa simple présence allégea un peu mon cœur.
Je savais que je pouvais avoir confiance en lui. Je savais qu’il pouvait me sauver de n’importe quelle situation. Je savais qu’il… Mais tout était si compliqué à présent…

Sans pouvoir détacher mon regard de lui, je l’observais se rapprocher de moi, jusqu’à ce qu’il se retrouve si près que sans même m’en rendre compte, je retins ma respiration.
Pourquoi l’avait-il appelé ? Je ne voulais pas que cette histoire s’ébruite. J’avais si honte de moi, de ma vie, de ce passé. Et voilà que celui que j’avais tant aimé m’avait retrouvé alors que j’avais tout fait pour lui échapper.

"A quoi ça rime, Docteur ? Je suis désolé de vous dire ça, mais si vous ne savez pas tenir le secret de confidentialité avec votre mari, cela peut aller très loin... Comment savait-il que vous étiez ici ? Et que voulait-il faire en essayant d'infiltrer la base ?"

Ses questions me firent l’effet d’un électrochoc. J’étais responsable de sa présence. Il me rendait responsable de sa présence. Une fois de plus, j’allais tout perdre à cause de Michael.
J’y voyais trouble sans savoir que c’était parce que je m’étais mise à pleurer doucement.
Il m’avait retrouvé, encore. Et j’allais tout perdre, encore.

« Il m’a retrouvé… »dis-je d’une petite voix éraillée. « Je ne voulais pas… Je n’ai jamais dit que… J’ai tout fait pour… Je suis désolée… Je ne voulais pas…»

Je devais paraitre parfaitement ridicule aux yeux de ces officiers, à pleurer sans pouvoir aligner deux mots juste parce que mon « mari » voulait me voir. Il fallait que je me reprenne mais j’en étais incapable. Il était juste là, dans la salle d’à côté. Si près qu’il ne l’avait plus été depuis des années et je me retrouvais comme à l’époque, incapable de me défendre.

J’étais responsable. C’était de ma faute.

On y était. Cette fois je paniquais pour de bon.

La panique à cause de cet homme qui m’avait fait tant de mal et qui continuait à m’en faire. La panique de perdre mon poste. La panique de perdre l’estime de Jack. La panique de me faire arrêter pour trahison.

Il fallait que je me reprenne.

Prenant une grande inspiration, j’encrais mon regard dans celui de Jack.

« Je ne sais pas comment il m’a retrouvé ! Et ce n’est plus mon mari depuis longtemps ! J’ai… J’ai changé de nom et même de continent pour lui échapper mais… Ce n’a pas suffit… »

Ma voix m’avait paru très forte alors que je me doutais que je n’avais dut que souffler ces paroles.
Je n’avais pas tout dit mais pour le moment, c’était déjà pas mal. Au moins, il savait que je n’étais pas responsable de sa présence.